Peine de mort pour blasphème

En janvier 2016, Abdul Inyass a été condamné à mort pour « blasphème contre Mahomet ». Le condamné appartient à un ordre musulman soufi opposé à la violence.

Dans ces douze États fédérés du Nord, la charia régit tous les domaines de la vie. (wiki)

Kano est la deuxième plus grande ville du Nigéria et la capitale de l’État fédéré éponyme. Sous le gouvernement actuel, Kano passe pour un haut lieu de l’islam sunnite orthodoxe agressif qui veut accélérer l’islamisation du Nigéria. La population du pays est composée d’environ 50 % de musulmans au Nord et de 50 % de chrétiens au Sud.

Il est vrai que dans l’État de Kano, à l’instar des onze autres États fédérés soumis à la charia, les non-musulmans ne peuvent pas être forcés de se faire juger par un tribunal islamique. Mais depuis l’instauration de la charia au tournant du millénaire (à Kano en juin 2000), il est interdit de construire ou même de réparer des églises, comme dans les onze autres États islamiques.

Par ailleurs, les personnes d’une autre religion doivent se soumettre au code vestimentaire islamique étatique et les femmes sont gravement discriminées (elles n’ont par exemple pas le droit de conduire une voiture). Les femmes sont aussi séparées des hommes, que ce soit dans les transports publics, dans les écoles, dans les hôpitaux ou dans toutes les institutions étatiques. La consommation d’alcool est également strictement interdite pour tous les habitants de ces onze États islamiques.

Ces dix dernières années, des attentats sanglants sont régulièrement perpétrés à Kano par le mouvement terroriste islamiste Boko Haram (en français, « l’éducation occidentale est péché »). On compte déjà plusieurs centaines de victimes. Le gouvernement local, de même que ceux des autres États islamiques n’ont pas poursuivi les responsables de ces crimes.

Une phrase a suffi…

Le 5 mai 2015, Abdul Inyass, prêcheur d’un ordre soufi, a prononcé un discours à l’occasion d’un événement organisé par les membres de son ordre dans la ville de Kano. Il aurait exprimé que le fondateur de sa confrérie Tijaniyya était « plus grand que le prophète Mahomet ». Peu après, neuf disciples de M. Inyass ont été arrêtés et accusés de « blasphème contre le prophète ».

Lorsque les accusés sont apparus pour la première fois devant le tribunal le 22 mai 2015, de violents troubles déclenchés par des musulmans radicaux ont éclaté. La maison de M. Inyass et même des parties du Palais de justice ont ensuite été réduites en cendre. Les audiences suivantes ont eu lieu à huis clos.

Quatre des accusés pour blasphème ont été acquittés, mais les cinq autres ont été condamnés à mort en juin 2015. Abdul Inyass a pu trouver un refuge temporaire à Abuja, la capitale du Nigéria. Mais le 18 août 2015, il a également été arrêté, ramené à Kano et condamné à mort pour blasphème et pour incitation à la violence le 5 janvier 2016.

Max-Peter Stüssi


L’islam modéré au pilori

M. Inyass et les autres condamnés appartiennent à la confrérie Tijaniyya, un ordre soufi désapprouvant l’islam sunnite orthodoxe. Cet ordre s’engage aussi politiquement contre l’instauration d’un État islamique.
À la différence du wahhabisme d’origine saoudienne, la vie de foi de la Tijaniyya n’interprète pas le djihad comme un effort visant à soumettre le monde entier à l’islam. Elle accorde une plus grande attention aux principes de la vie de foi intérieure du croyant. À cette expression mystique de l’islam appartiennent la prière pour le pardon des péchés personnels, les prières adressées au prophète Mahomet et une foi inconditionnelle à l’unicité de Dieu.

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