Un groupe chrétien est battu avant d’être accusé

Des extrémistes hindous en furie interceptent un groupe de chrétiens qui se rend à un camp pour enfants. Ils obtiennent de la police que les enfants soient enfermés pendant une semaine et les adultes pendant dix jours.

L’une des mères concernées essaie de consoler sa fille en pleurs, avant que la police ne les sépare. (msn)

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À Indore (État fédéral du Madhya Pradesh), le 23 octobre 2017, Anita Francis et sa fille Sophie (19 ans) montent dans le train à destination de Mumbai. Elles accompagnent sept enfants pour les amener à un camp chrétien avec le consentement de leurs parents. Ces quatre garçons et trois filles sont âgés de 5 à 17 ans.

Forcés de sortir du train

Les chrétiens sont déjà installés dans le train lorsqu’un groupe d’hindous s’introduit dans leur compartiment. Ils appartiennent à l’organisation Jagran Manch, un mouvement sympathisant du parti nationaliste hindou (BJP) du Premier ministre indien Narendra Modi. Ces derniers contraignent les chrétiens à quitter le train, reprochant à Anita d’avoir enlevé ces enfants pour les convertir au christianisme. Le frère d’Anita, Amrit Kumar Matera, est également expulsé du train avec son fils Alex. C’est en vain que ce dernier tente d’expliquer aux extrémistes que tous les enfants sont des chrétiens baptisés. Sur le quai de la gare, une foule en furie les conspue et les frappe.

Les enfants ne sont pas épargnés par les mauvais traitements. Une mise en scène est savamment orchestrée : des journalistes sont là pour mener une enquête et ils en arrivent à relater un acte d’enlèvement d’enfants. Amrit est convaincu qu’il s’agit d’« un plan préparé de longue date ».

Les médias prétendront ensuite qu’Alex et Anita avaient l’intention d’acheminer ces enfants vers Kerala[1] pour les convertir.

Forcés d’adorer des dieux hindous

S’ensuit une humiliation suprême, lorsque la populace hindoue entraîne le groupe chrétien vers les locaux de police de la gare : « Ils nous menaçaient de nous frapper si nous refusions d’adorer des dieux hindous à haute voix, comme eux-mêmes le faisaient. Lorsque nous refusions, ils nous frappaient, les adultes comme les enfants. »

Pour Amrit, ce spectacle est à peine supportable : deux enfants âgés de 5 ans doivent répéter la formule « Hail Lord Ram ». « Nous étions désemparés, car nous ne pouvions rien faire pour empêcher cela. »

Les enfants séparés de leurs parents durant plusieurs jours

Une fois mis au courant, les parents se rendent sans retard au poste de police. Mais au lieu de leur restituer leurs enfants, la police laisse les extrémistes hindous se moquer et molester les parents, à leur tour. Ensuite, les parents doivent brièvement identifier leurs enfants, après quoi ils sont à nouveau séparés.

La police auditionne les parents, avant que les garçons soient transférés vers un foyer d’enfants de la banlieue, tandis que les filles sont acheminées dans un couvent hindouiste. Les parents n’ont plus aucun contact avec leurs enfants. C’est en vain qu’ils tentent de déposer plainte au poste de police.

Finalement, à 23 heures, les policiers laissent repartir les deux jeunes accompagnants, Sophia Francis et Alex Matera, tandis que leurs parents respectifs, Anita et Amrit, sont placés en garde à vue, accusés d’enlèvement, de conversion forcée, de trafic d’enfants, de harcèlement sexuel et d’offense à une religion.

De retour dans leur famille

L’audience au tribunal a lieu une semaine plus tard, le 30 octobre 2017. Les juges demandent à chaque enfant auprès de qui il désire retourner. Comme un seul homme, ils déclarent qu’ils veulent absolument rentrer chez leurs parents, en accusant les policiers de les avoir frappés. Les enfants sont alors remis à leurs parents, mais les juges ne prennent pas acte de leurs reproches à l’égard des forces de l’ordre.

Quant à Anita Francis et Amrit Kumar Matera, ils sont relâchés le 3 novembre contre le versement d’une caution, leur avocat ayant demandé à une haute instance le droit à un examen immédiat de leur détention. Toutefois, les griefs d’accusation n’ont pas été levés.

Les agissements grossiers de la populace hindoue et de la police ont laissé des séquelles chez les enfants et leurs parents. Alex Matera témoigne : « Ils sont comme pétrifiés et font des crises d’angoisse. Ils se demandent quel va être le prochain épisode. » Selon le journal Indian Express, les parents des enfants concernés n’osent plus retourner dans leurs villages.

L’avocat chrétien R. P. Gangore a remis une pétition avec la question urgente de savoir pourquoi la police n’a pas pris acte de la plainte déposée contre les exacteurs hindous, sachant que ces derniers ont menacé et frappé les accompagnants, les enfants et leurs parents. À la suite de son intervention, Me Gangore a rencontré une forte opposition de la part de quelque cent avocats, tous opposés à lui, comme en atteste une source anonyme : « Cela montre le climat d’inimitié générale contre les chrétiens qui règne en Inde. Et les médias jouent la même partition. Ils publient même les adresses des victimes, en sorte que celles-ci se sentent encore plus insécurisées. Pourquoi les médias ne remettent-ils pas en question les déclarations de la police et des autorités ? »

Reto Baliarda

[1] Une des régions d’Inde avec la plus forte majorité de chrétiens.

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