Au bon endroit au bon moment

La situation des minorités du Myanmar est désastreuse. Alors que la détresse des Rohingya, musulmans pour la plupart, a suscité un grand émoi, peu de personnes ont connaissance de la souffrance de nombreux chrétiens au Myanmar. CSI en a visité certains. Nous sommes arrivés à point nommé.

Ces réfugiés gravement malades entreprennent un dangereux trajet en bateau pour aller à l’hôpital. (csi)

En décembre 2019, la Cour internationale de justice (CIJ) des Nations unies a lancé une procédure à l’encontre du Myanmar : ce pays est accusé de génocide envers la minorité musulmane des Rohingya qui a été attaquée massivement par l’armée en 2017. En quelques mois, un exode a mené sept cent mille Rohingya au Bangladesh. Cet immense déplacement de population a eu des conséquences désastreuses et le Bangladesh s’est trouvé débordé. CSI a lancé une action d’aide urgente.

Un voyage vers les oubliés

Les attaques de l’armée contre les minorités ne sont malheureusement pas une nouveauté au Myanmar. D’autres minorités ethniques sont chassées de chez elles depuis plusieurs dizaines d’années, parmi lesquelles de nombreuses sont d’obédience chrétienne. Des dizaines de milliers de réfugiés se trouvent ainsi en Thaïlande, alors que d’autres n’ont même pas la possibilité de quitter le pays et habitent depuis de nombreuses années dans les camps situés à la frontière. Leurs conditions de vie sont désastreuses. C’est vers eux que nous nous sommes rendus.

C’est animés d’un sentiment un peu étrange que nous nous lançons sur des chemins thaïlandais boueux pour un trajet de plusieurs heures. Nous traversons ensuite clandestinement le fleuve qui fait frontière avec le Myanmar à bord d’un canot. Combien nous sommes reconnaissants d’avoir passé entre les mailles du filet des armées thaïlandaise et birmane ! Nous parvenons donc sans encombre à notre but : un camp de réfugiés dans lequel vivent environ sept cents Karen, dont la plupart sont des chrétiens.

Une attaque est possible à chaque instant

Nous passons deux jours dans ce camp. La tension est permanente : l’armée du Myanmar peut attaquer le camp de réfugiés à chaque instant et la milice karen est sur les dents jour et nuit. Les réfugiés logent dans de simples cahutes construites sur pilotis, on s’assied et on dort à même le plancher, sans coussins. Nombre d’entre eux se trouvent dans le camp depuis plusieurs années et n’ont aucun espoir de le quitter un jour.

Un père de famille de trois enfants âgé de 43 ans nous raconte : « Je suis continuellement en fuite depuis l’âge de 8 ans, l’armée a détruit mon village à plusieurs reprises, je ne me suis jamais trouvé en sécurité nulle part. J’ai donc jeté l’éponge et rejoint un camp de réfugiés en 2006. »

CSI organise un transport et une opération chirurgicale

Nous nous rendons au chevet d’une femme de 25 ans qui est enceinte de dix mois et se trouve en danger de mort. Cette jeune femme qui se tord de douleur est couchée sur une simple natte. Le personnel médical du camp, formé sur le tas, est dépassé par la situation et le transfert vers un hôpital thaïlandais est hors de prix. Parallèlement, nous entendons parler d’une autre urgence : un jeune homme de 14 ans a d’intenses douleurs au ventre depuis un mois ; il est aussi désespéré et son visage est marqué par la douleur.

Nous actionnons immédiatement tous les moyens possibles pour sauver ces trois vies humaines (y compris le bébé) : les malades doivent absolument être acheminés vers un hôpital en Thaïlande. Ils supportent courageusement un voyage astreignant de plusieurs heures en bateau et en voiture pour parvenir à l’hôpital ! Plus tard, nous apprenons que tous les trois sont sains et saufs ! Nous sommes très touchés et infiniment reconnaissants. À l’avenir, CSI veut mettre à disposition des moyens financiers pour que les réfugiés gravement malades puissent, à l’instar de cette femme enceinte, être transportés à l’hôpital.

CSI


Les chrétiens du Myanmar

La population du Myanmar est majoritairement birmane et bouddhiste. Environ 6 % des 54 millions d’habitants sont chrétiens. La plupart d’entre eux appartiennent aux minorités ethniques des Karen, Karenni, Kachin et Chin. Ils habitent avant tout dans les régions économiquement favorables, le long de la frontière avec la Thaïlande, la Chine et l’Inde. De nombreux chrétiens vivent dans des régions qui sont contrôlées par des groupes de rebelles. Ils sont attaqués depuis plusieurs dizaines d’années par l’armée qui domine le pays depuis longtemps. En 2015, des élections libres ont eu lieu pour la première fois depuis vingt-cinq ans. Aung San Suu Kyi a été élue pour diriger le gouvernement. Malheureusement, pour les minorités religieuses et ethniques, peu de choses ont vraiment changé avec l’accession au pouvoir de la lauréate du prix Nobel de la paix 1991 qui avait suscité tant d’espoirs : elles restent soumises à la répression et aux attaques.

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