Des millions de personnes du monde entier ont attendu cette joyeuse nouvelle : le 8 mai 2019, le ministère des Affaires étrangères pakistanais a confirmé qu’Asia Bibi avait quitté le Pakistan. Elle s’installera dans sa nouvelle patrie, le Canada, où elle pourra enfin serrer sa famille dans ses bras.
John Eibner : « Une chrétienne courageuse »
Depuis l’incarcération d’Asia Bibi en 2009, CSI s’est mobilisée pour sa libération. Nous sommes donc très heureux que le gouvernement pakistanais ait enfin veillé à ce qu’Asia Bibi puisse quitter le pays en toute sécurité – même si plus de six mois ont passé après la décision de la Cour suprême qui demandait sa libération immédiate. À ce sujet, le directeur de CSI John Eibner déclare : « Asia Bibi est une chrétienne courageuse qui a tenu ferme dans sa foi même durant les périodes les plus difficiles. Sa liberté est un sujet de grande joie. Néanmoins, nous sommes très inquiets de constater le pouvoir intact qu’ont les accusateurs islamistes sur les chrétiens au Pakistan. De nombreuses autres victimes pakistanaises des lois sur le blasphème, basées sur la charia, sont toujours en prison ou doivent se cacher. CSI augmentera son engagement en leur faveur afin qu’elles puissent vivre dans la liberté et la dignité. » Nous désirons ici remercier infiniment tous les amis de CSI qui ont soutenu les campagnes pour la libération d’Asia Bibi !
La dispute et ses terribles conséquences
La souffrance qu’Asia Bibi a vécue au cours de ces dernières dix années semble être un cauchemar qui ne cesse pas : en juin 2009, tout commence par une dispute entre Asia Bibi et des travailleuses agricoles musulmanes ; ces dernières refusent de boire de l’eau au même récipient qu’Asia. Comme chrétienne elle l’aurait « contaminé ». S’ensuit une dispute verbale sur la religion au cours de laquelle Asia Bibi aurait dit : « Christ est mort pour moi. Mahomet qu’a-t’il fait pour vous ? » Après quoi, les musulmanes frappent Asia Bibi en l’accusant d’avoir insulté leur prophète.
Les accusations de blasphème se répandent ensuite comme une trainée de poudre et une foule islamiste en furie attaque Asia Bibi avec l’intention de la tuer. La police intervient et la met en détention provisoire. En novembre 2010, cette mère de deux enfants est condamnée à mort pour violation de la loi sur le blasphème. Alors que dans le monde entier, des personnes protestent contre ce verdict et exigent la libération d’Asia Bibi, au Pakistan, des milliers d’islamistes descendent dans la rue et scandent des paroles de mort contre la chrétienne détestée. Tous ceux au Pakistan qui s’engagent en faveur d’Asia Bibi risquent leur vie. Ainsi, en 2011, deux politiciens hauts placés, Salman Taseer, gouverneur musulman du Punjab, et le chrétien Shahbaz Bhatti, ministre des Minorités, sont assassinés par des islamistes radicaux car ils s’étaient mobilisés pour la libération d’Asia Bibi.
En octobre 2014, la cour supérieure de Lahore confirme la sentence de mort contre Asia Bibi.
De furieuses protestations massives après l’acquittement
Quatre ans plus tard, la Cour suprême d’Islamabad acquitte Asia Bibi de toutes les accusations. Le tribunal annule la sentence de mort et ordonne la libération immédiate de la chrétienne. Ce verdict d’octobre 2018 déclenche de furieuses protestations des groupements islamistes. Le religieux islamiste radical Khadim Rivzi du parti Tehreek-e Labbaik Pakistan (TLP) exige le licenciement des juges et la mort d’Asia Bibi.
Les manifestations massives et les blocages des rues ne cessent que lorsque le gouvernement conclut un accord avec le TLP qui prévoit la possibilité d’une demande en révision contre le verdict et qui empêche le départ d’Asia Bibi du pays. Le 29 janvier 2019, la Cour suprême confirme l’acquittement et lève l’interdiction de sortie du pays pour Asia Bibi.
En dépit de ce verdict, la chrétienne acquittée ne peut pas quitter le Pakistan. Le Premier ministre Imran Khan a déclaré le 11 avril 2019 que le départ d’Asia Bibi prenait du retard à cause de certaines complications. Cependant le 8 mai 2019 arrive enfin la nouvelle : Asia Bibi a quitté le Pakistan et peut commencer une nouvelle vie avec sa famille au Canada.
Reto Baliarda
Les lois sur le blasphème arbitraires : Asia Bibi n’est pas un cas isolé
Selon l’article 295 du Code pénal pakistanais, toute personne qui s’exprime de façon dénigrante sur le prophète Mahomet ou le Coran peut être punie de mort. L’accusation de blasphème est un moyen de se débarrasser des personnes gênantes. Jusqu’à présent, plus de mille personnes ont été concernées par de telles accusations. Des rumeurs de blasphème suffisent pour déclencher des actes violents de foules déchaînées ; des dizaines de personnes soupçonnées de blasphème ont déjà été assassinées.
L’un des meurtres les plus connus et les plus cruels s’est produit le 4 novembre 2014 : des islamistes furieux ont torturé le couple chrétien Shahzad Masih et Shama Bibi à cause d’accusations de blasphème. Ils leur ont brisé les jambes, les ont trainés vivants avec un tracteur et les ont finalement jetés dans un four à briques en feu.
Même des mineurs et des handicapés mentaux sont victimes des lois sur le blasphème, comme en 2012, une jeune fille Rimsha Masih, âgée alors de 14 ans (les médias suisses ont également écrit à son sujet). Les minorités religieuses comme les chrétiens et les ahmadis sont touchées disproportionnellement par des accusations de blasphème.
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